Pourquoi la SAS introduite en 2015 par le Droit OHADA tarde-t-elle à prendre son envol au Sénégal ?

Pourquoi la SAS introduite en 2015 par le Droit OHADA tarde-t-elle à prendre son envol au Sénégal ?

 Depuis l’introduction de la SAS et de la SASU par l’OHADA (art. 853-1 à 853-24 /nouveau Livre 4-1), le constat que j’ai fait est que cette forme sociétaire n’est pas très utilisée au Sénégal et dans la sous-région.

Cette tendance est-elle due à une méconnaissance des textes autour de la SAS ou à une non sensibilisation autour des avantages liés à cette forme sociétaire, les questions demeurent et restent sans réponses.

Toujours est-il que la SAS n’a pas pris son envol comme il se doit. Sa création répond à divers objectifs dont les buts recherchés étaient de faciliter la mise en place des sociétés commerciales plus modernes avec des modalités de constitution et un fonctionnement simplifié (décidé en amont par les associés). La SAS permet aussi de relever les standards de gouvernance et renforcer les droits des associés. Elle reste une forme sociétaire très adaptée à nos réalités socio-culturelles dans la mesure pour une fois , il  nous est permis de pouvoir façonner des choses qui nous sommes pas imposés de l’occident (possibilité d’insérer des clauses adaptées à nos réalités etc)

Dans la foulée, cette incapacité à créer des SAS montre-t-elle notre  limite :

  • à travailler ensemble sur des partenariats ou des projets communs, ( beaucoup de SARL , peu de SAS et de SA)  
  • à fixer nos propres règles de gouvernance et dans une moindre mesure savoir les respecter après en aval,
  • à savoir transmettre ou céder nos parts tout au long de la vie d’une entreprise
  • à mettre en place des pactes d’associés indépendamment des règles statutaires ;

Bref résumé des caractéristiques de la SAS :

  • Souplesse contractuelle : liberté accordée aux associés pour déterminer les règles de fonctionnement et de transmission des actions.
  • Simplification du formalisme dans les SASU.
  • Responsabilité des actionnaires limitée aux apports.
  • Structure évolutive facilitant le partenariat.
  • Possibilité de constituer une SAS avec un seul associé (et donc de créer une filiale à 100 %).
  • Possibilité de consentir des options de souscription ou d’achat d’actions aux dirigeants et/ou aux salariés de la société.
  • Crédibilité vis-à-vis des partenaires (banquiers, clients, fournisseurs).

 

Intérêt de la SAS :

  • aux entrepreneurs qui recherchent un statut juridique peu contraignant;
  • aux entreprises et ou associés qui cherchent à organiser leur coopération sans engager leur responsabilité indéfiniment et solidairement;
  • aux groupes de sociétés pour leurs filiales installées en Afrique de l’ouest;
  • aux entrepreneurs qui étaient en SARL et qui souhaiteraient assouplir certaines de leurs règles de fonctionnement ( l’aspect juridique etc)

 Nombre d’associés:

  • Dans les SAS pluripersonnelles il suffit de deux associés.
  • Il est possible de créer une société par actions simplifiée avec un associé unique (SASU).

Capital social (nouvel article 853-5):

  • Le montant du capital social ainsi que celui du nominal des actions est fixé par les statuts (librement par les associés);
  • La société   par actions simplifiée  peut  émettre  des actions  inaliénables résultant d’apports en industrie : ce qui est une opportunité indéniable pour associer les salariés dans le capital qui disposent d’une expertise technique indispensable à la bonne marche de la société;
  • Les statuts déterminent les modalités de souscription et de répartition de ces actions
  • La société par  actions  simplifiée  ne  peut  faire  publiquement appel  à l’épargne ( garantie indispensable pour les épargnants, compte tenu de la liberté dans l’organisation de la SAS)

 Fonctionnement de  la SAS

Sont applicables à la SAS :

  • les articles 694 à 822 ; 853-1 à 853-25 de l’AUSCGIE;
  • les règles concernant la constitution (libération, publicité) le contrôle, la dissolution, la liquidation des S.A ainsi que celles relatives aux valeurs mobilières ;
  • les dispositions générales sur les sociétés commerciales (art. 4 à 269) et celles de l’AUSCGIE qui n’y dérogent pas.

Pour l’application de ces règles et à défaut de stipulations statutaires spécifiques, les attributions du conseil d’administration ou de son président sont exercées par le président dans la société par actions simplifiée ou celui ou ceux de ses dirigeants que les statuts désignent à cet effet ( par exemple un DG ou un DGA).

Un nouvel article 853-7 prévoit que les organes de direction de la société sont fixés en toute liberté par les statuts ( décisions des associés en amont, d’où la nécessité d’en discuter avec un notaire et/ou un expert-comptable).

Par ailleurs, les pactes extra-statutaires (très rares dans notre environnement OHADA) fixent donc les conditions dans lesquelles la société est dirigée.

Et l’article 853-8 nouveau de préciser que :

  • Le président, qui est le seul organe obligatoire, peut être une personne physique ou une personne morale;
  • Reprise de la solution donnée pour la SA par l’art. 465, 4 s’agissant des attributions du Président de la SAS;
  • Transposition de la solution donnée pour la SA par l’art.465, 5.

Le projet prévoit que la SAS est représentée à l’égard des tiers par un président   désigné dans les  conditions prévues parles statuts.

Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance  au  nom de la société dans  la  limite de l’objet social.

Décisions Statutaires ( quelques particularités)

Sont cependant obligatoirement soumises à l’unanimité ou doivent l’être, les décisions concernant :

  • l’exclusion d’un associé,
  • la transformation d’une société préexistante en SAS,
  • l’augmentation des engagements de tous les associés,
  • le transfert du siège social à l’étranger.

Les décisions qui seraient prises en violation des dispositions légales ou statutaires relatives aux conditions de validité des décisions collectives, peuvent être annulées à la demande de tout intéressé .

De la même manière, le seul organe directorial obligatoire est le président qui peut bénéficier d’un contrat de travail antérieur ou postérieur à sa nomination  (même s’il possède 99 % des actions de la société ou s’il en est l’associé unique, il bénéficie du régime fiscal et social des salariés)

Et, dans les sociétés pluri-personnelles, l’assemblée générale des associés fixe tous les ans la rémunération du président. Celle-ci doit figurer au procès verbal.

NB : Un conseil d’administration n’est pas obligatoire comme dans les S.A.

S’agissant des associés, un autre avantage de la SAS consiste en la possibilité pour la société de décider de l’exclusion  d’un  associé.

Par ailleurs, les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles un associé peut se retirer de la société, cette dernière devant alors lui racheter ses actions.

Il est possible aussi, pour assurer une certaine stabilité à la société, d’insérer dans les statuts une clause d’inaliénabilité des actions, ceci pour une durée maximum de dix ans.

Responsabilité du président et / ou des dirigeants

Dans ses rapports avec les tiers, la société est engagée par les actes du président qui ne relèvent pas de l’objet social, dans les conditions et limites fixées à l’article 122 de l’AUSCGIE.

Lorsqu’une personne morale est nommée président ou dirigeant d’une société par actions simplifiée, les dirigeants de ladite personne morale sont soumis aux mêmes conditions et obligations et encourent les mêmes responsabilités civile et pénale que s’ils étaient président ou dirigeant en leur nom propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu’ils dirigent (disposition vise à assurer une garantie tant pour la société, les associés que les tiers à celle-ci)

Les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d’administration des sociétés anonymes sont applicables au président et aux dirigeants de la SAS.

Et de la même manière, l’article 853-10 nouveau dispose que les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d’administration des sociétés anonymes sont applicables au président et aux dirigeants de la SAS.

Les opérations sur le capital

  • Les statuts de la société peuvent prévoir l’inaliénabilité des actions pour une durée n’excédant pas dix ans (nouvel article 853-17)
  • Les statuts peuvent, dans les conditions qu’ils déterminent, soumettre toute cession d’actions à l’agrément préalable des associés et à un droit de préemption (nouvel article 853-18), ce qui est d’ailleurs conseillé à ce stade.
  • Toute cession d’actions effectuée en violation des clauses statutaires est nulle.
  • Dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions. Lorsque les statuts subordonnent cette mesure à une décision collective des associés, ils ne peuvent pas priver l’associé dont l’exclusion est proposée de son droit de participer à cette décision et de voter sur la proposition.
  • Ils peuvent également prévoir la suspension des droits non pécuniaires de cet associé tant que celui-ci n’a pas procédé à cette cession.
  • L’article 853-22 nouveau offre  une  garantie  pour  les  associés  exclus de la SAS.
  • Ainsi, si les statuts ne précisent  pas  les  modalités  du  prix  de  cession des actions lorsque la société met en œuvre une clause introduite en application des nouveaux articles 853-18, 853-20 et 853-21, ce prix est fixé par accord entre les parties ou, à défaut, déterminé par un expert désigné, soit selon les stipulations des statuts de la société, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par ordonnance de référé du président du tribunal [de la juridiction compétente du siège social] sans recours possible.
  • Lorsque les actions sont rachetées par la société, celle-ci est tenue de les céder dans un délai de six mois ou de les annuler

Pour en finir, j’aimerais sensibiliser les notaires sénégalais à œuvrer à la vulgarisation de cette forme sociétaire, en fonction des besoins de leurs clients et de leurs attentes (droit à un bon conseil).

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